La Calanque de Méjean, une claque à la morosité
Confortablement installé(e), je me projette dans cet ailleurs reposant.
Le mistral a dégagé le ciel provençal et le mois de mai, à peine né, en a profité pour hisser sa grande voile et mettre une claque à la morosité. Sur le rebord du Massif de l’Estaque, le petit port de Méjean sourit sous les fines arches de son viaduc qui arrondissent le décor. Dans son intimité, la calanque rousse et ocre offre son hospitalité aux visiteurs fatigués de la vie et des coups du sort.
Sur l’escarpement de la falaise, les pins d’Alep argentés se tordent en offrande au soleil, leur fragrance ambrée danse dans l’air marin, ravit mon âme qui se surprend à respirer. Mon inspiration se prolonge, mon expiration se prolonge.
Le chant du vent et de la mer se répondent.
Le mistral aère ma tête, délite mes tensions, dépoussière mes chairs. Une grande expiration, bouche ouverte, évacue le reste de ma nervosité.
Le chant du vent et de la mer parfois se confondent…me bercent
A l’entrée du port, une ronde de rochers affleure, danse et bruisse d’écume…En cette fin de matinée, le scintillement de la Méditerranée crépite d’énergie et les pépites de bonheur virevoltent autour du promeneur désinvolte qui s’attarde sur le sentier côtier.
Elfes et ondines m’appellent.
Dans l’eau émeraude, je me glisse, la fraîcheur saisit mes muscles un instant, mais après quelques brassées dans la douceur du fluide, je m’acclimate, me délecte de me faufiler dans les ondes pures qui m’enveloppent et me délassent. Le Massif de l’Estaque se reflète et les transparences miroitent, dilatent mon plaisir…Je me sens bien.
La calanque en berceau dentelée, renaît un sentiment de bonheur qui se croyait émoussé…A l’appel de l’inspiration, il s’infiltre en profondeur et se fixe au repli de l’expiration, lèvres closes, dans ma tête…dans ma gorge…ma poitrine…mon ventre…mon dos…et se diffuse à tout mon être en respirations enchantées…Je me sens bien.
Retour : progressivement je ramène ce bonheur dans mon lieu de vie… Je donne l’impulsion du retour, de bas en haut : je bouge mes orteils, mes jambes, inspire…m’étire…baille, sans mettre la main devant la bouche…je me tends tout(e) entier(e), me relâche, et projette cette vitalité dans ma réalité…J’ouvre les yeux au monde extérieur. Bon retour !
« Vidée de tout le relatif, la conscience trouve une vaste ouverture à une vie tout à fait nouvelle qui va sans cesse en s’élargissant vers l’infini. »
Nagarjuna, sage bouddhiste,